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  •   "Je saluais la lune une dernière fois alors qu'elle disparaissait derrière la crête, et que je descendais toujours; une minute ou deux après, je me trouvais inopinément à Saint Germain de Calberte. L'obscurité était si totale que je ne vis rien du village, excepté un carré de lumière qui tombait d'une porte ouverte sur la route. Des gens qui s'étaient attardés à bavarder par-dessus un mur de jardin me conduisirent à l'auberge. La propriétaire couchait ses poussins; le feu était déjà éteint et il fallut, non sans qu'elle renaclât, le rallumer; une demi-heure plus tard, j'ai dû gagner mon perchoir sans souper.
    <?xml:namespace prefix = v ns = "urn:schemas-microsoft-com:vml" /><v:shape id=Cévennes o:spid="_x0000_s1027" type="#_x0000_t75" alt="Randonnée Stevenson GR70 St Germain de Calberte en Lozère." o:allowoverlap="f"><?xml:namespace prefix = w ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:word" /><w:wrap type="square"></w:wrap></v:shape>Quand je m éveillai (jeudi 2 octobre), entendant grande fanfare de coqs et caquetage de poules satisfaites, je me mis à la fenêtre de la chambre propre où j'avais passé la nuit. Je contemplai une matinée ensoleillée dans une vallée profonde aux plantations de châtaigniers. Il était encore de bonne heure et le chant des coqs et les lumières obliques et les ombres allongées m'incitèrent à sortir explorer les alentours.
    Saint Germain de Calberte est une grande paroisse d'environ neuf lieues de circonférence. A l'époque des guerres de religion et juste avant la dévastation, elle était habitée par deux cent soixante-quinze familles dont neuf seulement étaient catholiques. Il fallut au curé dix-sept journées du mois de septembre pour aller à cheval, de maison en maison, faire un recensement.
    <v:shape id=Village o:spid="_x0000_s1028" type="#_x0000_t75" alt="Randonnée Stevenson GR70 St Germain de Calberte en Lozère." o:allowoverlap="f"><w:wrap type="square"></w:wrap></v:shape>Mais la localité elle-même, quoique chef-lieu de canton, est à peine plus importante qu'un hameau. Elle s'étage en terrasses sur une pente escarpée au milieu de vigoureux châtaigniers. La chapelle protestante s'élève un peu plus bas, sur un éperon. Il y a, au centre du village, une vieille et curieuse église catholique.
    C'est en ce lieu que le pauvre du Chayla, martyr du Christ, avait sa bibliothèque et tenait école de missionnaires. Ici, il avait édifié son tombeau, pensant reposer au sein d'une population reconnaissante d'avoir été rachetée de l'erreur et c'est ici qu'au lendemain de sa Cévennes mort on apporta, pour l'inhumer, le corps percé de cinquante-deux blessures. Revêtu de ses habits sacerdotaux, il fut exposé en grand apparat dans l'église.
    <v:shape id=Eglise o:spid="_x0000_s1029" type="#_x0000_t75" alt="Randonnée Stevenson GR70 St Germain de Calberte en Lozère." o:allowoverlap="f"><w:wrap type="square"></w:wrap></v:shape>Le curé, empruntant son texte au livre second de Samuel, chapitre vingtième, verset douzième, "Et Amasias baignait dans son sang sur le grand chemin" prêcha un sermon pathétique. Il exhorta ses frères à mourir, chacun à son poste comme leur infortuné pasteur. Au mitan de cette éloquence, le bruit court qu'Esprit Séguier approche et voilà que toute l'assistance saute en selle et détale qui à l'est, qui à l'ouest et le curé lui-même s'enfuit jusqu'à Alais.
    Etrange était la situation de cette petite métropole catholique - un diminutif de Rome - dans pareil milieu sauvage et hostile. D'une part, la légion de Salomon la surveillait de Cassagnas, d'autre part, elle était coupée de tout secours par la légion de Roland, à Mialet.
    <v:shape id=_x0000_s1030 type="#_x0000_t75" alt="" o:allowoverlap="f"><w:wrap type="square"></w:wrap></v:shape>Le curé Louvrelenil, bien que pris de panique aux funérailles de l'archiprêtre et qu'il eût prestement décampé vers Alais, restait fidèle à sa chaire isolée. De là, il fulminait contre les crimes des Protestants. Salomon assiégea le village pendant une heure et demie, puis battit en retraite. On pouvait entendre les miliciens postés en sentinelles devant la porte du curé chanter dans l'obscurité des psaumes protestants et bavarder en amis avec les insurgés. Au matin, bien que pas un coup de feu n'eût été tiré, il n'y avait plus une once de poudre dans leurs poires à munitions.
    <v:shape id=Camisards o:spid="_x0000_s1031" type="#_x0000_t75" alt="Randonnée Stevenson GR70 St Germain de Calberte en Lozère." o:allowoverlap="f"><w:wrap type="square"></w:wrap></v:shape>Qu'était-elle devenue ? Tout le monde prêtait la main aux Camisards en compensation. Gardiens peu sûrs pour un prêtre isolé !
    L'imagination se figure à grand-peine que St Germain de Calberte ait pu être autrefois la scène de ces agitations incessantes. Tout y est maintenant si paisible. Les pulsations de la vie humaine battent maintenant d'un rythme si discret et si lent dans ce hameau de la montagne ! Des gamins m'escortèrent un bon moment à distance, comme eût-on dit, des chasseurs timorés de lions". Voyage avec un âne dans les Cévennes

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  •  Le chemin va en montant vers le Plan de Fontmort, un haut lieu où se déroulèrent pas moins de trois combats au temps des Camisards. D'ailleurs, je passe près d'un obélisque qui fut solennellement dédié en 1887, à l'occasion du centenaire de l'édit de tolérance, par les pasteurs et la population  « à la paix religieuse et à la mémoire des martyrs ».
    Ces hautes pentes (elles culminent de 800 à 1000 mètres) étaient au XIXème siècle largement dénudées où paissaient les troupeaux de la transhumance estivale. A la fin du XIXème siècle, l'Etat entreprit de reboiser. C'est ainsi que le chemin Stevenson serpente dans cette forêt magnifique de résineux et de hêtres.
    Je franchis le col de la Pierre Plantée (891m) avant de redescendre à St Germain de Calberte (489m)
    St Germain est un chef lieu de canton très animé l'été : lieu qui a eu un triple rendez-vous avec l'histoire : au Moyen-Age avec les restes d'un village médiéval près du gardon (rivière), autour du château de Saint Pierre qui se restaure peu à peu depuis 1964. Magnifique!  Avec l'époque de la Réforme et des Camisards. Et au cours des années 1940, la région devint une terre de refuge : pour les communistes allemands et autrichiens chassés dans les années 1930, pour les maquisards français et aussi pour les juifs cachés en grand nombre. Quatre de ces héros tranquilles de la région ont reçu de l'Etat d'Israël la médaille des Justes.
    J'aperçois les « bancels » ou « faïsses », terrasses aménagées sur les pentes, autrefois toutes cultivées. L'exode rural du XIXème a frappé la région,  90% de la population est partie, vers les villes du Sud ou vers la capitale. Dans les années 1970, d'autres jeunes sont arrivés, parfois restés et redonnent vie à la région.

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